Le Livre
Tant de fois elle avait tremblé à l’idée de se fendre en deux morceaux avides d’en découdre. La France et l’Algérie. Un temps, elle avait cru trouver refuge à l’école, là où l’Histoire, quand elle est insoutenable, n’est pas écrite dans les manuels. Elle n’y avait pas appris pourquoi, lorsque la mère donnait le nom du père, les lèvres se scellaient, les regards se troublaient, les mots sifflaient. Elle n’y avait rien entendu sur presque un siècle et demi de colonialisme. Et sa mère, elle-même, l’avait si tôt encouragée à oublier, caressant ses tempes et baisant ses mains chaque fois qu’elle triomphait de l’angoisse.
Fille d’un Algérien et d’une Française, née en France pendant la guerre d’Algérie, Lil croit d’abord qu’elle n’a pas d’histoire puisque personne ne prend la peine de la lui raconter. Un moment tentée de l’abandonner, elle décide finalement de l’apprivoiser et apprend peu à peu à dire « je ».
Ce roman est le tout premier de Tassadit Imache, paru pour la première fois en 1989 chez Calmann-Lévy. Elle en a ensuite publié sept autres, dont Le Dromadaire de Bonaparte (Actes Sud, 1995), Presque un frère (Actes sud, 2000), Des cœurs lents (Agone, 2017), Fini d'écrire ! (Hors d'atteinte, 2020) et Le Voyage empêché (Hors d'atteinte, 2023).
En savoir plus
Sélection du Goncourt du premier roman 1989.
Préface de Faïza Guène.
Postface de Tassadit Imache.
« Au-delà du brio de cette évocation, on est saisi de la première à la dernière page par l’émotion que dégage cette écriture retenue, par la force des images suscitées en des mots justes et simples. » Le Monde
« Aucun attendrissement gratuit, mais une justesse de ton et une émotion née de la contradiction humaine. » Révolution
« Le livre donne une existence aux silencieux, qui sont d’autant plus émouvants qu’ils savent rester dignes. Un très beau livre, tragique. » L’Événement du jeudi
« Par sa charge d’émotion, par sa violence, par le caractère souvent insolite de son approche du monde, ce roman devrait toucher tous ceux qui croient, à tort, qu’eux non plus n’ont pas d’histoire. Le Monde de l’éducation
Comment peut-on être « une fille sans histoire » quand on est la fille d’un Algérien et d’une Française, née pendant la guerre d’Algérie en France ?
Automne 61, en banlieue parisienne, de Bezons à Nanterre. Fille d’Ali et de Huguette, qui se sont rencontrés à l’usine, Lil Azhar est Lila pour son père, Liliane pour sa mère. À l’oreille des gens, le nom du père résonne comme « Hasard » et, pour sa mère, c’est toujours ça de gagné ! Car elle doit faire face au racisme et à la misère, à la désespérance, à l’opprobre d’aimer un Norafricain qui lutte avec les siens pour leur liberté, contre ses compatriotes à elle. Au sortir de la guerre, la famille est relogée dans une cité HLM. Les années 1970 sont celles de l’adolescence de Lil et sa fratrie. Son père, usé par l’usine et l’injustice, sombre peu à peu dans l’alcool et la rancœur.
Poussée par sa mère qui veut coûte que coûte que ses enfants aient leur place dans leur pays, Lil s’éloignera de sa famille et se construira hors de la cité. Grâce à la figure forte de la directrice d’une maison d’enfants, Yvonne Hagnauer, elle s’ouvre aux livres et à la musique.
Si Lila Azhar se voudrait sans histoire, est-ce pour échapper à la sienne, violente et douloureuse dont personne autour d’elle ne souhaite se souvenir ? Loin d’un retour aux origines fantasmées, Lil se vit comme l’enfant assumée d’un métissage, d’une histoire apprivoisée. Jusqu’à dire « je » à l’issue de son parcours.
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